Seine-Saint-Denis

« 93 » ou « 9-3 », ou mieux selon moi « Seine-Saint-Denis » : question de génération, ou d’habitude. Dans tous les cas, c’est dire à quel point on ne se contente pas ici d’être un département comme les autres : la Seine-Saint-Denis s’invente, se crée ou recrée une identité pour mieux se la réapproprier, une identité plus complexe, plus charnue aussi, qui va bien au-delà du simple découpage administratif car, plus qu’aucun autre, ce territoire est intensément vécu depuis l’intérieur et ardemment fantasmé depuis l’extérieur.

On dit « 93 » comme on porte un label, comme on répète un automatisme, comme on récite un refrain: Seine-Saint-Denis style… Le « 93 », c’est un étendard que l’on porte avec orgueil : Seine-Saint-Denis pride, parce que toute chose ici acquise est une conquête. Mais c’est aussi un matricule que l’on a parfois le sentiment de porter contre son gré : 93, pour nos jeunes en recherche d’emploi par exemple, ce peut être avoir tiré le mauvais numéro. L’identité composite de ce territoire est tout autant une marque qu’un marqueur. Et de cette tension naît notre singularité.

La Seine-Saint-Denis est multiple, marquée par de fortes inégalités, tiraillée par ses contradictions. De l’apparat des rois de France enterrés dans la Basilique de Saint-Denis au dénuement des ouvriers immigrés des deux derniers siècles, de la misère des ascenseurs qui refusent de monter en haut des tours à la modernité criante des pôles économiques d’envergure internationale, des violences trop nombreuses aux solidarités coriaces,… D’ouest en est, aussi… Autant de disparités qui émaillent ce territoire-symbole. La Seine-Saint-Denis est une terre de contrastes. Et entre témoignage de l’histoire nationale et entrevue de la France de demain, le manque d’espoir d’une population qui a parfois l’impression d’avoir été reléguée hors de notre Etat de droit. Pourtant, les initiatives citoyennes et culturelles, les pratiques alternatives fleurissent dans toute la Seine Saint-Denis, qui a souvent été et continue d’être à la pointe de l’innovation dans de nombreux domaines.

Car en Seine-Saint-Denis, nos faiblesses sont aussi nos forces. C’est pourquoi il n’est pas de fatalité pour ce Département : l’avenir dépend avant toute chose des impulsions que, tous ensemble, chacun dans nos rôles et nos responsabilités, nous saurons lui donner et des décisions qui seront prises pour ce territoire, tant au niveau local que national. Il n’est donc pas question de nous plaindre mais d’agir. Mes collègues élus et moi-même voulons deux choses : l’égalité républicaine et la reconnaissance de ce que la Seine-Saint-Denis apporte d’ores et déjà au pays tout entier. Le dynamisme démographique qui fait tant défaut à un pays vieillissant, les espaces disponibles pour accueillir des villes intenses et durables, le métissage des populations qui sera la norme de demain : autant d’atouts d’une rare puissance, à condition toutefois d’être à la hauteur des défis qui sont par eux posés. Autant d’atouts indispensables, aussi, au redressement de notre pays. Nous avons donc, ici, collectivement, l’obligation de réussir, pour notre jeunesse, pour le rassemblement, pour la justice, pour la France.








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