Interview au site libération.fr

le 20 novembre 2010 :: Dans la presse

J'ai donné une interview au site Libération.fr que je vous propose de retrouver ci-dessous:

 

Squats dans les halls d'immeuble, trafics en tout genre dans les cages l'escalier et dans les caves: des problèmes chroniques dans les banlieues que le gouvernement s'engage régulièrement à éradiquer. Fatigué de «l'écart insupportable entre la réalité de terrain et le discours des dirigeants», Stéphane Troussel, nommé il y a un an à la tête de l'Office public de l'habitat (OPH) de Seine-Saint-Denis, et élu PS au conseil général, a mené l'enquête dans les quelques 1500 halls d'immeubles qu'il gère (Stains, La Courneuve, Dugny...). Résultat: 16% des halls d'immeuble sont occupés de manière anormale, dont la moitié par des trafiquants de drogue.

 

L'occupation des halls et les problèmes de drogue attenants ne sont pas un phénomène nouveau. Qu'apporte votre enquête ?

 

Les choses se sont enkystées ces dernières années, quoiqu'en dise le gouvernement. Je suis élu local à La Courneuve depuis quinze ans. En prenant la direction de l'OPH 93, j'ai voulu qu'on s'empare, en tant que premier bailleur public du département, de ces problèmes d'insécurité. Bien entendu, ce n'est pas notre mission première, qui est de construire des logements sociaux et d'entretenir le parc existant. Mais il me semble essentiel qu'on se mobilise sur ces questions d'insécurité. J'ai donc mis sur pied une «direction de la tranquillité et du développement social». Avec comme premier objectif de réaliser un état des lieux et mettre en place un observatoire de l'insécurité.

 

Sur quoi repose votre étude ?

 

On a passé en revue les 1512 halls d'immeubles des 23.000 logements de notre parc de Seine-Saint-Denis. En se fondant sur les plaintes des locataires et les remontées de nos agents de proximité (gardiens d'immeuble, agents d'entretien...). Il en ressort deux éléments. 16% des halls sont occupés de manière anormale, dont la moitié par des groupes de jeunes qui se retrouvent là en mal d'espace, de manière plus ou moins occasionnelle, créant des situations plus ou moins tendues. Mais ce qui m'inquiète le plus, c'est l'autre moitié: 8% des halls sont squattés par des trafiquants de drogue. Et là, c'est l'égalité républicaine, l'état de droit qui est bafoué. Quand des locataires sont obligés de baisser la tête et demander pardon pour rentrer dans leur immeuble, c'est un problème d'une autre importance, relevant de la police.

 

Christian Lambert, le préfet de Seine-Saint-Denis, s'était pourtant explicitement engagé à lutter contre ces occupations des halls d'immeuble ?

 

Je me souviens du discours de Nicolas Sarkozy, le 20 avril dernier, à l'occasion de l'entrée en fonction du nouveau préfet. «Aucun hall d'immeuble ne sera occupé», promettait-il... Depuis, Christian Lambert communique régulièrement sur les halls d'immeuble qu'il visite. Je veux bien saluer sa détermination mais en pratique, ce n'est pas ça, ni les actions coups-de-poing des forces de l'ordre, qui vont régler le problème. Ça le déplace, c'est tout. Délogés à un endroit, ils investissent un hall 300 mètres plus loin.

 

Que préconisez-vous ?

 

Il faut une police de proximité. Appelez-la comme vous voulez, police de terrain, de quartier... Qu'importe. Seul un travail mené au quotidien sur le long terme par des forces de l'ordre permettra de venir à bout du problème. A travers cette enquête, je veux aussi rappeler qu'un agent de proximité n'a pas vocation à se transformer en policier alors qu'aujourd'hui, dans les faits, il se retrouve parfois le seul représentant de l'autorité publique dans un quartier. Le chef de l'Etat nous promet des moyens. Or, aujourd'hui, les comptes n'y sont pas: on manque toujours de plusieurs centaines de policiers dans le département. Ce ne sont pas les caméras de vidéosurveillance qui règleront le problème. Je ne suis pas contre une expérimentation mais la solution miracle n'existe pas.

 

Que comptez-vous faire?

 

Demander un entretien avec le préfet Christian Lambert pour lui présenter ce diagnostic. Et j'espère lui faire comprendre que ces actions policières coups-de-poing ne suffisent pas. Il faut qu'elles soient suivies d'investigations au long cours. Par ailleurs, en tant que bailleur social, je souhaite que l'on travaille à un cahier de recommandations pour les architectes. Leur dire que dans certains endroits, il n'est pas nécessaire de prévoir un hall de 30m2, ni de multiplier les entrées ou de prévoir des logements au rez-de-chaussée. Il est important que les spécialistes du logement social se positionnent sur ces questions.



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