Les cent premiers jours du changement

le 07 septembre 2012 :: Actualités

Le vent tourne vite dans la sphère médiatique de l'immédiat. Alors qu'en avril dernier on assistait à une sorte de conversion massive de la presse à l'ascension, voire au quasi miracle hollandais, le président est subitement tombé en disgrâce aux yeux des journalistes en cette rentrée. Le thème est bien connu – et rentable, manifestement : le chef de l’État et son Premier ministre enregistrent une chute inédite de leur côte de popularité. Comme à chaque fois, c'est du « jamais vu ». Mais peut-être faudrait-il poser en retour la question de savoir si l'on a jamais vu, sur la période à laquelle on se réfère, une crise d'une telle ampleur...

Quoi qu'il en soit, il m’apparaît plus urgent de dresser un véritable bilan des avancées acquises au cours de ces tant commentés cent premiers jours du quinquennat.

La session parlementaire extraordinaire a-t-elle été une « session du temps perdu » ?

Non. En trois mois d'exercice du pouvoir au sommet de l’État, près d'un tiers des soixante engagements pour la France du candidat Hollande ont été, partiellement ou intégralement, honorés : vote d’un collectif budgétaire supprimant les principaux symboles fiscaux du quinquennat de Sarkozy (engagements n°9 et 17) – parmi lesquels la TVA sociale et l’allègement de l’impôt sur la fortune –, retour partiel de la retraite à 60 ans (n°18), abrogation de la circulaire de la honte sur les étudiants étrangers (n°39)… Autant de domaines dans lesquels l’actuel gouvernement remet de l’ordre, de la mesure et de la justice. Du bon sens, aussi, comme en témoigne, entre autres, la fin d’une RGPP aveugle ou encore l’abandon du projet « idéologiquement douteux », selon l'historien Pierre Nora, d’une Maison de l'histoire de France – comme si l’histoire était écrite une fois pour toutes, objective, comme si les identités pouvaient être gravées dans le marbre. Au plan international, enfin, le président a annoncé le retrait des troupes françaises d'Afghanistan dès la fin de l'année 2012 (n°59).

Les mesures prises se limitent-elles au démantèlement de l'héritage injuste de l'ère sarkozyste ?

En aucun cas. Le gouvernement Ayrault a pris des initiatives fortes dans un grand nombre de domaines, en conformité avec les engagements énoncés pendant la campagne. Ainsi, la défense du pouvoir d’achat figure au premier rang des combats menés par l’exécutif : augmentation du SMIC de 2%, revalorisation de l’allocation de rentrée scolaire de 25% (n°16), encadrement des loyers à la relocation dans 38 agglomérations (n°22), baisse des taxes sur les carburants à la pompe pour les trois prochains mois… Le plafonnement de la rémunération des dirigeants des entreprises publiques constitue par ailleurs un gage en faveur de la justice sociale (n°26, remanié), tout autant que l’instauration d’une taxe de 0,2% sur certaines transactions financières (n°7, remanié). Enfin, des réformes ambitieuses ont été amorcées à travers la grande consultation de refondation de l’école – priorité absolue du mandat – ou les prémisses d’une nouvelle politique sécuritaire avec la création des zones de sécurité publique.

La « présidence normale » est-elle une coquille vide ?

Si la décence et la retenue ne font évidemment pas un programme, elles ont néanmoins leur importance. La marque Hollande, c’est aussi une vision de l’exercice du pouvoir : le retour d'une certaine éthique – matérialisé à travers la signature, par chacun des ministres du gouvernement, d'une charte de déontologie et la réduction de leur rémunération de 30% (n°47) – a, je le crois, produit des effets positifs sur le regard que peuvent porter les Français sur leurs dirigeants. Le fossé grandissant entre la population et la sphère politique réclamait bien cela.

Le dialogue renoué avec les corps intermédiaires (n°55), une plus grande transparence en matière de nominations publiques – dans la justice notamment (n°53) : les signes donnés sont de nature à apaiser une société habituée à vivre dans la défiance permanente.

Bien entendu, chacune de ces mesures peut être jugée incomplète, perfectible ou même insatisfaisante. Il me semble toutefois indispensable de conserver à l'esprit que François Hollande a pris ses fonctions dans le contexte budgétaire le plus contraint que la Ve République ait jamais connu. Mais surtout, aux voix qui s'élèvent pour critiquer l'insuffisante vélocité du train du changement qui est résolument en marche, je voudrais rappeler les sages propos récemment tenus par Jean-Marc Ayrault : « le mandat, c’est cinq ans, ce n'est pas cent jours ».



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