Lors du vote du premier budget de cette nouvelle mandature, aucun travail d'élaboration collective préalable entre les divers groupes d'élus n'a eu lieu. C'est donc un budget de reconductions, sans évolutions tangibles, que la majorité municipale a présenté, alors même que des engagements ont été pris, des attentes ont été exprimées. Cela nous a conduit à nous abstenir sur ce budget.
Voici le contenu de l'intervention que j'ai faite lors du conseil municipal du 10 avril 2008 :
Mesdames, Messieurs, chers collègues,
Chacun sait à quel point l'élaboration du Budget d'une collectivité est contrainte par les décisions du gouvernement en matière de dotations. Je ne vais pas revenir très longtemps sur ce sujet car les élus socialistes en ont largement fait état lors du Débat d'Orientations Budgétaires. Je veux simplement dire sur ce premier point que, entre le DOB du mois de février et aujourd'hui, nos craintes ne peuvent qu'être renforcées. Entre les mesures déjà connues de quasi-stagnation des dotations de l'Etat aux collectivités locales et les annonces récentes par le gouvernement du gel ou de l'annulation de 7 milliards de crédits dans le budget 2008, il y a fort à craindre que les collectivités locales fassent elles aussi les frais du plan d'austérité préparé par le Président de la République et son 1er ministre. Leur volonté est claire : il s'agit de transférer aux villes, aux départements et aux régions les charges financières qu'ils ne veulent plus assumer. Avec une dette publique de près de 1300 milliards d'euros, la tentation est grande pour ce gouvernement de se défausser sur le dos des élus locaux. Et de les pousser à faire des économies drastiques, en rognant sur leurs missions de services publics. Histoire surtout de les priver de ce précieux outil de justice sociale que constitue la fiscalité, et de les contraindre à revoir les impôts à la hausse, au risque de les rendre impopulaires. On ne peut pas écarter que cette tentation de transfert de charges supplémentaires intervient alors que la quasi-totalité des régions sont de gauche ainsi que, depuis les dernières élections, une majorité de communes et de départements ! Cette tentation est aussi électorale pour permettre à l'UMP de se refaire une santé avant les prochaines échéances nationales de 2012 ! Le gouvernement envisage également d'« habiller » ce plan de rigueur par le biais de réformes dites structurelles, qui consisteraient par exemple à ce que la principale dotation versée - la Dotation Globale de Fonctionnement (DGF) - soit en totalité versée aux intercommunalités pour les inciter à répartir tout ou partie de l’enveloppe aux communes. Le danger est clairement d’opposer les villes à leurs intercommunalités. Il y aura donc vraisemblablement des initiatives à prendre, non pas de manière isolée au niveau de notre commune seule, mais bien de manière coordonnée avec les autres communes, départements, régions, quelle que soit d'ailleurs leur couleur politique car on voit bien que cette question soulève de grandes inquiétudes pour tous les élus locaux.
Je voudrais donc concentrer l'essentiel de mon propos sur les propositions budgétaires pour notre commune. Chaque année bien sûr, le vote du Budget Primitif constitue un des moments essentiels des débats de notre assemblée. Il revêt cette année une dimension particulière compte tenu que le choix a été fait de reporter ce vote, qui intervient traditionnellement en décembre de l'année précédente, juste après les élections municipales pour permettre de commencer - et c'est bien normal - de traduire les orientations de l'équipe qui l'a emporté et les attentes exprimées à l'occasion de ce débat démocratique avec les Courneuviens. La note préparatoire indique d’ailleurs cette volonté en première page.
Un mot sur la méthode : lors du Débat d’Orientations Budgétaires, je m'interrogeai sur l'état de préparation du Budget Primitif, compte tenu du fait que les adjoints que nous étions à ce moment avec Jo Bons et Michel Hoen, et je crois pouvoir y ajouter Didier Schulz, n'avaient pas participé à des arbitrages dans leurs délégations et que le Bureau Municipal tout entier, hormis un cadrage budgétaire intervenu en juillet 2007, n'avait pas non plus avancé dans les arbitrages financiers. Gilles Poux m'avait alors répondu je cite : « rien n’est définitif, il n'y a pas de budget caché... les arbitrages seront rendus après les élections municipales ». Dont acte. Mais alors, de deux choses l'une : soit les arbitrages ont effectivement eu lieu après les élections et on ne peut que remarquer que…nous n'y avons pas été associés ! Alors me direz-vous : c'est d'abord à la majorité de faire des propositions budgétaires ! Certes mais nous avons, les élus socialistes et les verts, dit notre disponibilité pour rechercher les voies et les moyens d'un travail en commun au service des courneuviens. Encore faudrait-il que les espaces soient créés pour le permettre. Je pense notamment au travail en commissions. Or aucune n'a été créée et le vote du Budget Primitif aurait pourtant pu être cette première occasion. Mais il n'est pas encore trop tard, le conseil municipal a la possibilité d'ajuster les propositions soumises au débat. Nous ne pouvons croire que la volonté d’associer largement les citoyens aux débats municipaux s'arrête, en ce début de mandat, à la porte du Conseil municipal…Il appartient donc aujourd’hui à la majorité municipale de savoir si elle souhaite ou non échanger avec les élus socialistes et verts plus qu’une fois par mois, lors des séances du conseil municipal. Nous y sommes prêts. A vous maintenant, et au-delà des discussions sympathiques que nous pouvons avoir avec les uns ou les autres d’entre vous, de le vouloir et de le permettre.
Il y a une autre hypothèse dans la construction de ce budget, que nous pensons la plus probable. C'est qu'il s’agit uniquement d’un budget de reconduction qui ne traduit aucune évolution. Mais, vous pourriez me dire : c'est bien normal car le maire sortant a été reconduit. Certes, mais un programme a été présenté, des engagements ont été pris, des attentes ont été exprimées. Il nous avait même été reproché durant la campagne que nos propositions étaient soit déjà en oeuvre, soit étaient déjà validées et n'attendaient qu'à être traduites concrètement et budgétairement. Mais alors comment les engagements de campagne se traduisent-ils financièrement dans la proposition de budget ? A moins que ce Budget Primitif – pourtant voté en avril avec des recettes connues précisément – suppose déjà une importante Décision Budgétaire Modificative qui sera présentée dans une séance ultérieure. Je prendrai quelques exemples, notamment dans les secteurs que nous avons eus à connaître particulièrement dans le dernier mandat :
· La petite enfance : les dépenses de fonctionnement (hors personnel) sont stables et non pas en hausse comme pourtant indiqué. C’est en effet exactement le même montant qu'en 2007. Hors, entre temps, depuis l'automne dernier, il y a un équipement nouveau - la Halte-Jeux - qui implique des dépenses supplémentaires. Cela signifie-t-il qu’il est prévu de réduire d’autres actions dans ce secteur ?!! Par ailleurs, il y a en projet – en tous cas nous y avions travaillé - l'ouverture attendue d'un relais-assistantes maternelles, qui nécessite là aussi des financements supplémentaires. Or, le budget présenté ne les prévoit pas.
· Hygiène et Santé, y compris pour renforcer les actions de contrôle en direction des commerces de proximité : nous nous sommes exprimés, notamment lors du DOB, pour que des actions nouvelles soient entreprises. Je crois que ce sentiment était même largement partagé à gauche. Par ailleurs, nous avons délibéré sur un périmètre pour la sauvegarde du commerce de proximité, y compris en utilisant le droit de préemption. Rien ne semble prévu budgétairement, y compris en lien avec Plaine commune, pour mener des actions nouvelles.
· Culture : lors du Budget Primitif 2007 et à l'occasion du DOB 2008, nous avions pour notre part défendu la nécessité de développer la médiation culturelle pour favoriser la fréquentation culturelle. En effet, nous pensons que dans une ville comme la nôtre, il ne suffit pas d’avoir des équipements culturels. Il est indispensable de mener des actions pour faire venir les publics. Nous n'étions pas seuls à revendiquer cette nécessité, mais visiblement, même si j’ai bien entendu les commentaires oraux qui viennent d’être faits sur ce sujet, rien dans le budget ni dans la note qui l’accompagne ne prévoit de telles actions nouvelles.
· Sports : nous avons été nombreux à considérer dans la dernière période que la création et la rénovation des équipements de proximité étaient nécessaires. Nous ne savons pas si le budget présenté va le permettre alors que la somme inscrite pour les travaux dans les bâtiments et équipements communaux est en baisse de près d'1 million d'euros.
· Prévention/sécurité : concernant ce secteur, chacun sait ici que c'est un sujet important de débat entre nous, car nous pensons que l'organisation municipale actuelle ne répond pas de manière conséquente aux problèmes posés. Le budget alloué à ce secteur est en baisse et même si cette diminution est expliquée dans le document budgétaire, il nous paraît urgent d'évaluer concrètement les missions et l'organisation d'un secteur constitué des ALMS, des ASVP et demain des deux agents de Police Municipale. Et aussi parce que, en dépit des dénégations électorales, une Police Municipale est bien en voie de création à La Courneuve…ce qui rejoint la proposition que nous formulons depuis plusieurs années, notamment lors des votes des derniers budgets. Puisque les faits ne nous contredisent visiblement pas, il serait plus efficace de marquer solennellement et de manière transparente les évolutions en cours, y compris dans l’ajustement nécessaire des missions confiées à ces agents.
· Proximité, communication et évènements : pour ce secteur, nous émettrons, là aussi, les mêmes réserves que les années précédentes. D'abord, englober, dans la même rubrique, des actions aussi différentes que celles relatives à la communication, à l'évènementiel, à la démocratie locale ou participative empêche la lisibilité et l'appréciation des financements proposées pour ces différentes actions. Par ailleurs, ces sommes sont présentées comme stables mais elles ont fortement augmenté durant le dernier mandat. De plus, il y a une forte augmentation de la masse salariale sur ce secteur (+28% alors que les dépenses globales de personnel tous secteurs confondus, elles, n'augmentent que de 5,5%). On peut s'interroger sur ce à quoi correspondent ces 28% d'augmentation. Et ce n’est pas la peine de reprendre les mêmes exemples pour répondre à nos questionnements : ce ne sont pas l’ensemble des actions sur lesquelles nous marquons depuis des années nos interrogations, mais sur certaines spécifiques, comme les dernières rencontres La Courneuve 2010, à Babcock, à la fin 2006, dont d’ailleurs, nous aimerions connaître, à titre d’exemple, pour éclairer nos débats, le coût précis : location et installation de la salle, animation (journalistes, moyens vidéos…), brochures diverses, ainsi que le nombre de personnels municipaux requis.
Un dernier mot sur nos relations avec la communauté d'agglomération « Plaine Commune » : nous avons eu l'occasion au moment du DOB de faire des propositions notamment par rapport à la question des moyens financiers, par exemple sur la question de la Taxe sur les spectacles perçue aujourd’hui par la seule ville de Saint-Denis. Il nous semble qu'il y a sur cette question de nos relations avec la communauté d'agglomération - et le début d'un nouveau mandat s'y prête bien - il y a matière à faire le point sur les liens qui nous unissent à Plaine Commune. Plaine Commune est un établissement public de coopération d'abord au service des villes qui la composent. Plaine Commune n'est pas une super-ville de 300 000 habitants, sinon il faut en modifier le mode de gouvernance. La juste répartition des fruits de la croissance de l'agglomération doit être réalisée au profit de l'ensemble des communes, de manière équitable. C'est à chacun des élus, notamment ceux qui sont aux commandes de la ville et de l'agglomération, d'agir en ce sens. Nous ne changerons donc pas d’avis avant et après les élections des 9 et 16 mars sur ce qui nous avait toujours conduit à soutenir les aspects positifs de la gestion municipale et à souligner ses faiblesses et nos points de divergence.
Pour toutes ces raisons, et compte tenu des conditions de préparation et d’élaboration de ce Budget Primitif 2008 et des faiblesses qu’il contient selon nous, nous nous abstiendrons sur la totalité de ce budget. Je vous remercie de votre attention.